Partir vivre en Dordogne : le témoignage de Nadège

Entre sa vie à Paris et son installation dans la Dordogne, Nadège Gomila a exploré le monde. Un témoignage riche d’expériences et de bons conseils que Nadège nous fait le plaisir de partager.

Choisir de venir vivre à Paris. Pourquoi avoir fait ce choix ? Combien de temps y avez-vous vécu ?

Je suis fille d’expatriée et ai vécu presque toute ma vie à l’étranger. J’ai quitté la France en 1990 quand j’avais 5 ans, et y suis revenue faire mes études quand j’avais 18 ans. J’ai débuté mon parcours académique à Poitiers en 2003, suivi par 1 an d’échange au Mexique entre 2005 et 2006.

C’est en 2006 que j’ai eu ma première expérience parisienne. J’étais en 4ème année d’études à Sciences Po Paris et c’était donc une obligation de suivre le Master sur le campus parisien. J’y suis restée 3 ans. 2 ans pour finir mes études et 1 an en CDD (mon premier emploi) chez Guerlain jusqu’en 2009.

Pourquoi avez-vous quitté Paris ?

Je ne suis pas partie par réelle envie, mais plutôt par obligation. En 2009, la crise économique a gelé les embauches et mon CDD ne s’est pas transformé en CDI comme je l’espérais. Par contre une belle opportunité s’est offerte à moi, avec la possibilité de partir en VIE, toujours pour le groupe LVMH, mais cette fois pour la marque Givenchy, en Australie (Sydney).

Dans quelle ville et région êtes-vous partie vous installer ?

J’ai passé 3 ans en Australie. 3 années superbes. Une nouvelle façon de vivre et de travailler. Un rythme beaucoup plus « relax » que la vie parisienne que j’avais pu découvrir. Pendant ces 3 années, j’avais la charge du développement commercial de Givenchy sur le business aéroport, ainsi que sur les îles pacifiques (Tahiti, Nouvelle-Calédonie, Fiji…). Le job de rêve !

Au bout de 3 ans, je suis rentrée à Paris. Et cette fois, j’ai vécu une toute autre expérience ! Je n’étais plus étudiante, j’étais dans le monde du travail, chez Hermès cette fois. Métro, boulot, dodo…le vrai cliché parisien. En 2015 Hermès me propose de partir à Madrid, pour développer la zone Europe du Sud. Je saute sur l’occasion ! Je sature de Paris, j’ai envie de voyage, c’est l’opportunité idéale ! Et me voilà partie pour une nouvelle aventure, qui va durer 4 ans, jusqu’en 2019…

Vous avez décidé de revenir de l’étranger, sans passer par la case Paris. Racontez-nous la suite de votre aventure et votre nouvelle installation… en région cette fois-ci !

En 2019, cela fait presque 15 ans que j’évolue dans le milieu des parfums et cosmétiques. 15 années pendant lesquelles je ne me suis pas beaucoup posé de questions, et je me suis laissée embarquer dans le schéma classique des opportunités professionnelles et des promotions tous les 3 ans. Mais au fur et à mesure une certaine lassitude s’est installée, et beaucoup de questions sont venues s’immiscer… « est-ce que je me vois faire ça encore longtemps ? », « qu’est-ce que je suis capable de faire d’autre ? », « est-ce que j’ai envie de poursuivre dans le salariat ? » … Autant de questions auxquelles je n’avais pas encore trouvé de réponses.

J’ai décidé de me faire accompagner, en faisant un bilan de compétences. Et cela m’a permis d’y voir plus clair et d’avoir quelques certitudes : il était temps de tourner la page et de tenter l’aventure entrepreneuriale, particulièrement dans le domaine de l’accompagnement (c’est la partie que je préférais dans ma vie pro, accompagner, former et faire grandir les équipes). La décision a été prise début 2019 : au revoir Hermès, au revoir Madrid, bonjour la Dordogne et ma nouvelle vie !

Je me suis installée en Dordogne en juillet 2019 pour créer Bloomencia : un programme d’accompagnement à la reconversion professionnelle. Le programme se déroule sur 3 mois en partie à distance, avec au cœur du parcours 1 semaine complète en immersion en Dordogne, dans un château.

Évidemment, un changement de vie arrive avec son lot de questionnements, de doutes, de peurs. Est-ce que je n’ai pas fait une énorme bêtise ? Comment je vais m’en sortir financièrement ? Est-ce que ça va marcher ?

J’ai pris les étapes les unes après les autres.

Chercher des structures d’accompagnement : j’ai intégré un incubateur de startup, puis j’ai rejoint la French Tech Périgord Valley. Cela m’a permis de créer des ponts, de développer mon réseau, et surtout de rencontrer d’autres entrepreneurs, ce qui permet d’être moins seule. Il y a également Initiative Périgord qui a joué un rôle dans l’accompagnement financier du projet.

Je me suis formée au métier du coaching et de l’accompagnement, pour être en mesure d’acquérir de nouvelles compétences pour accompagner au mieux les personnes qui s’inscrivent au parcours. Cela m’a aussi permis de venir calmer la petite voix intérieure, le fameux syndrome de l’imposteur qui parfois peut être un peu paralysant. L’année 2019-2020 a été intégralement dédiée à la formation et à la création du parcours pédagogique de Bloomencia.

Évidemment le réseau proche, amis, pro, a joué un rôle fondamental au lancement du projet. C’est d’ailleurs grâce à eux que les premiers clients Bloomencia sont arrivés. Le bouche à oreille est clé !

Financièrement, j’ai aussi décidé de prendre quelques heures pour enseigner. Je m’appuie sur mes compétences professionnelles acquises pendant 15 ans pour transmettre. J’adore ça et en plus cela permet de garder un certain équilibre financier et donc de ne pas me sentir sous pression en permanence.

Bloomencia s’est lancé en Mars 2021 et se développe un peu plus tous les mois. Environ 50 personnes sont passées par le parcours et des sessions se lancent tous les 2 mois environ.

Les choses se mettent en place au fur et à mesure. Le plus dur c’est certainement de se lancer. Une fois la décision prise, c’est assez dingue de voir à quel point les pièces du puzzle viennent s’imbriquer les unes avec les autres et des opportunités se matérialisent. C’est évidemment beaucoup de boulot, mais je ne regrette rien. Aujourd’hui je me sens complètement alignée et épanouie. Pour rien au monde je ne retournerais vivre à Paris.

Je suis contente d’y retourner de temps à autres (d’ailleurs je réponds aux questions depuis un train direction la Gare Montparnasse) pour voir mes amis ou y faire quelques rendez-vous professionnels, mais j’en profite d’autant plus que je sais que je retourne en Dordogne pour retrouver le calme et la nature 🙂

Quitter Paris, partir vivre en région. Le bilan en une phrase ?

Un bilan plus que positif et le sentiment d’être pleinement à ma place.

Qu’avez-vous gagné en quittant Paris ?

J’ai gagné en sérénité et en calme. Je suis moins happée par le tourbillon, je ne cours plus après le temps. J’ai retrouvé un équilibre de vie qui me convient. Je vois enfin passer les saisons, je fais mon marché, je mange local et de saison.

Que regrettez-vous ?

Honnêtement pas grand-chose. Ce qui me manque le plus c’est sans doute mes ami(es) que je vois moins souvent. Mais beaucoup sont venus me voir et le temps passé ensemble est beaucoup plus qualitatif. Et sinon, merci WhatsApp pour garder le lien au quotidien ! Et puis des nouvelles rencontres se sont tissées ici.

Changer de vie, gérer le changement d’emploi, trouver un logement, organiser le déménagement… Quelles leçons tirez-vous de cette aventure ? Si c’était à refaire, que feriez-vous différemment ?

Je n’ai pas eu trop de difficultés à l’installation car j’avais pris mes précautions. J’étais venue passer quelques jours en plein hiver pour m’assurer que la vie en Dordogne me plairait pendant la période la plus rude. La partie la plus compliquée a sans doute été la recherche de logement, car n’étant plus en CDI ça peut faire peur aux agences immobilières pour monter un dossier de location. Néanmoins, j’ai remarqué aussi une plus grande confiance entre particuliers et beaucoup de choses se passent « au feeling ». Avoir un garant facilite évidemment les choses.

Baisse de salaire, prix de l’immobilier, coût de la vie… Quels sont les retours de votre porte-monnaie ?

En pleine création d’entreprise l’aspect financier est évidemment un point central. L’avantage de la Dordogne c’est que l’immobilier reste encore accessible et les locations beaucoup moins chères qu’à Paris. Pour exemple, une maison de 100m2 peut se louer environ 850-900€. Idem pour les courses : acheter local et de saison fait nettement baisser l’addition. Et puis les tentations sont moins présentes, du coup je fais moins de shopping qu’à Paris et ça soulage aussi le porte-monnaie 🙂

Quels conseils donneriez-vous à ceux qui réfléchissent à quitter Paris et changer de vie ?

Un changement de vie, qu’il soit pro ou perso, ça se prépare. Donc le premier conseil que je donnerais c’est de ne pas le faire sur un coup de tête.

Je recommanderais de venir passer quelques jours dans la région d’intérêt, en été comme en hiver, pour vraiment se faire une idée « en toutes circonstances ». Rentrer en contact avec des organismes locaux/régionaux (comme le réseau Initiative) permet aussi de prendre des premiers contacts et faire des premières mises en relation. Se créer un réseau est vraiment important pour faciliter l’installation. Il existe aussi de nombreux groupes Facebook dédiés aux nouveaux arrivant dans chaque région qui peuvent aussi un bon moyen de trouver des offres de logement (sans oublier Le bon coin…).

Dernier conseil : Anticiper oui, mais ne pas attendre que tout soit parfait. Une fois les premiers jalons posés, il faut y aller 😉

« Quitter Paris, c’est… »

… écrire un nouveau chapitre dans sa vie.

Merci Nadège pour ce joli témoignage et ses nombreux conseils !

Publié le 23 Jan, 2023